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Mes frères et mes sœurs (suite)

 

Fernand Bernardin

 

Fernand est né le 26 juin 1925 et est décédé le 31 décembre 1995. Lui et Rita Lapointe de Saint-Pierre, née le 26 novembre 1927, se sont mariés le 28 juin 1949. D’une façon ou d’une autre, ils se sont arrangés pour avoir huit enfants. Le plus vieux, Maurice, ensuite Gisèle, Roger, David (le plus beau du groupe), Arthur, Angelica, Lorraine et Jeannette, la dernière. Fernand aussi a eu la chance d’apprendre le métier de charpentier et comme de raison, les exigences de la ferme. Il a fini sa onzième année à l’école et a obtenu son premier permis pour enseigner. Il est allé enseigner pendant six mois, mais a dû arrêter, car il n’avait pas la patience pour faire ce métier. Le reste de la famille avait trouvé ça long pour Fernand, même si ce n’était que six mois. Il a donc continué à faire les semailles, à travailler le terrain, à cultiver les betteraves à sucre et à faire les foins avec Fleurette et moi. Il fournissait sa part de travail dans le jardin qui était encore assez considérable. Nous cultivions les patates, les betteraves rouges pour les animaux, du blé d’Inde, des choux, etc. Fernand prenait aussi soin du poulailler, les animaux d’étable, les chevaux. Mais les chevaux n’aimaient pas Fernand. Quand il approchait, ils se baissaient les oreilles, surtout Queen quand elle en avait la chance, elle essayait de ruer, ou même de le mordre; elle mangeait une raclée à chaque fois qu’elle montrait son manque d’amour.

 

Une fois, ma mère a été prise dans le champ de betteraves à sucre avec un groupe de travailleurs à cause d’une tempête qui s’est levée tout à coup. Fernand, Fleurette et Louis faisaient les foins le long du Grand Tronc quand Fernand aperçut de grosses nuées noires venant vers lui, il fouetta les chevaux vers l’étable à grande allure. Je me souviens de l’avoir aidé à dételer les chevaux du rack à foin afin de les laisser entrer à l’abri dans l’étable. De plus, on essayait de faire la même chose avec les autres animaux dehors dans la cour, mais sans succès. Ils se fermaient les yeux, ils allongeaient le cou avec le nez bien haut et essayaient d’éviter les grêlons gros comme des tasses. Finalement, il a fallu nous protéger nous-mêmes, on pouvait voir les glaçons frapper la porte d’en avant pour aller s’écraser sur les deux portes de l’étable à l’arrière. Cela a été une des plus grosses tempêtes de grêle que nous avons connues. Souvent en été, Fernand allait aider le père et Marcel à faire divers travaux de construction dans la province, surtout dans le Nord. Mais il fallait qu’ils soient de retour pour aider Fleurette et moi à faire les foins, à cultiver les betteraves à sucre, à travailler dans les jardins, etc. Souvent, on avait déjà cassé le grain pour les animaux, puisqu’il fallait le faire pendant les plus belles journées du printemps. On se servait du moulin des Bouchard, car c’était une besogne que l’on faisait une fois ou deux dans l’année.

 

Le nettoyage de la cour se faisait aussi au printemps avec Fleurette, Fernand, moi et d’autres membres de la famille, dépendamment du travail de chacun. Après le passage des eaux du printemps, les berges étaient boueuses et souvent les animaux s’embourbaient. Je me souviens d’avoir sorti du bétail avec les chevaux. Mais je me souviens surtout de la fois où nous avions sorti la vache à m’man (maman), la meilleure façon a été de lui mettre une grosse chaîne autour du cou et de la tirer avec la Fordson. Pendant quelques secondes, tu te demandes si tu vas réussir! Mais avec Fernand, il fallait que ça passe ou que ça casse. C’était toute une expérience!

 

Fernand était obsédé par tout le travail qu’il voyait autour de lui ainsi que la difficulté à s’adapter au monde qui se modernisait et qui changeait dans son entourage. Un dicton qu’il répétait souvent : « Il est mieux d’y avoir de la justice l’autre bord, car il y a de la merde qui va voler! » Il est mort depuis maintenant douze ans et je n’ai rien vu voler encore!

Laurette Bernardin

J’arrive à la plus vieille des filles, Laurette, née le 9 octobre 1926. Je suis sûr qu’elle a joué un rôle important dans la besogne de la maison, surtout qu’elle était la quatrième d’une famille de douze. Mes souvenirs importants d’elle? Elle jouait du piano à l’oreille. Je trouvais cela merveilleux. Elle écoutait un morceau de musique à la radio et après quelques reprises, elle pouvait le jouer au piano.

Je me souviens aussi qu’elle suivait un cours au Success College à Winnipeg. Ça, c’était tout un événement. Ce n’était pas ordinaire dans ce temps-là. Elle travaillait en dehors et on la voyait de moins en moins souvent. Finalement, elle épousa Laurent Allard le 19 juillet 1945 et ils établirent leur demeure à Lido Plage. Nous avions de la chance parce que nous pouvions aller danser au Lido et voir notre sœur en même temps. Les danses à cette époque étaient le boogie-woogie, le ballin’ the jack et le charleston, qui commençaient à décliner. Nous, c’étaient principalement les polkas, le fox-trot, qui n’a rien à voir avec le renard, mais plutôt avec Harry Fox qui aurait inventé cette danse, ensuite le two-step, le one-step, le quick step, le chateese et les valses, pour faire damner les gars. À la même époque, le jive est arrivé. Cette danse a été très populaire et pendant plusieurs années. Ces danses sont encore là aujourd’hui, mais peuvent varier en raison des petits changements qu’on y a apportés. D’autres occupations : chez Laurette, en été, il y avait des échanges de main d’œuvre pour les travaux dans les champs et pour les bestiaux tels que les moutons, les volailles, etc. Père de huit enfants, Laurent est décédé le 14 mai 1995. Le plus vieux, Denis, né en 1948, ensuite Michèle, Sylvie, Luc, Jacques, Marie-Anne, Véronique et Élizabeth en 1964. Pendant plusieurs années, Laurette a passé son temps libre à faire du bénévolat à l’Hôpital Grace. Puis elle a déménagé à Saint-Eustache pour être plus près de ses filles. Aujourd’hui, elle est revenue à Élie dans les motels qui ont été construits pour des retraités. Je remarque qu’elle n’est jamais dans son appartement quand nous allons à Élie pour la visiter. Je ne sais pas si elle apprécie les bouteilles de vin que je lui laisse dans sa porte entr’ouverte. La dernière fois que je l’ai vue, elle m’a dit que le vin n’était plus là à son retour. Alors, il faut conclure qu’il y a des voleurs de vin dans la place.

 

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