À l’aube de 2007, année des 18 ans d’Élianne, la vie est belle. Elle étudie en bio-écologie et se dirige en biologie marine. Elle est athlète en vélo de montagne, a un amoureux et part pour le Mali visiter son frère et sa famille... Élianne est heureuse. Jusqu’à la journée fatidique où sa vie bascule.
Les textes de cette chronique proviennent d'extraits de courriels envoyés à la famille par Jocelyne, sa maman. L’histoire d’Élianne m’a bouleversée et je voulais vous donner la chance de la lire. Pour vous faire connaître un peu Élianne, nous avons débuté cette chronique dans le numéro de mai 2017 par son voyage au Mali avec Jocelyne. Nous vous recommandons cette lecture préalable. MISE EN GARDE : certaines images et textes peuvent heurter la sensibilité des personnes non averties.
Élianne prend de l'assurance avec sa canne
26 octobre 2008
Après que toute la pluie soit tombée sur nous hier... BON MATIN QUAND MÊME TOUT LE MONDE!
Ici la revenante du fond de la Montée Gagnon. Je ne vous ai pas oublié, mais les choses évoluant tranquillement, les nouvelles se font plus rares. Et, comme j'ai de petits problèmes avec mon compte Hotmail depuis qu'ils ont « reconfiguré » le site Internet (mon ordi est trop vieux et trop poche pour prendre tous ces changements), je ne peux pas relire ce que je vous ai écrit en juillet, donc pardonnez-moi d'avance si je me répète.
L'été 2008 a passé finalement assez vite et malgré le temps plus ou moins poche, nous en avons profité aussi. Disons que j'étais mieux chez-moi, sur le bord de ma nouvelle piscine que sur les trottoirs du boulevard Gouin! Et parlant de piscine, Élianne y a quand même passé pas mal de temps à s'exercer à plonger. Elle y arrive bien à partir des marches, mais elle est absolument incapable de se maintenir au fond de l'eau et d'y nager, et ce n'est pas faute d'avoir essayé!!!
Gilbert et moi avons pu prendre neuf grandes journées de vacances à Cape Cod, Élianne était bien pendant ce temps-là avec tous ceux qui se sont relayés pour lui tenir compagnie. On était tellement déconcertés de n'avoir que nous-mêmes à s'occuper qu'on faisait rusher notre amie Paule en étant, dès 9 h 30, bien prêts à partir pour la plage... J'ai lu à peu près 12 romans, cela vous en dit long sur mon niveau d'activité durant ces vacances!!! Élianne nous a fait promettre de l'amener l'an prochain, elle veut revoir ces belles dunes dont elle ne se rappelle rien, sauf sans doute une vague sensation de plaisir. Comme elle peut marcher maintenant de bonnes distances, elle pourra sûrement nous y accompagner, mais probablement pas refaire du « boogie board », elle qui passait normalement ses journées à jouer dans les vagues. Maintenant, la plus petite vaguelette la déstabilise totalement.
Renaud a passé une bonne partie de l'été avec nous, un été qu'il a terminé en beauté par un voyage d'un mois au Mexique avec Cynthia. Ils sont partis à l'aventure et ont bien aimé ça. Ils sont revenus en pleine nuit, juste la veille de notre départ à Élianne et moi pour les Îles de la Madeleine, juste à temps finalement pour déguster quelques verres d'une excellente téquila en nous racontant quelques-unes de leurs péripéties. Ils sont maintenant bien installés à Québec, Renaud étudie à l'Université Laval en géographie et Cynthia travaille dans les bibliothèques de la ville. Renaud viendra faire un tour cette semaine, il est en relâche et présentement en randonnée dans les Chic Chocs (chanceux a dit sa sœur).
Élianne, égale en cela à elle-même, aime toujours être dehors, faire des activités de plein air lui manque. Depuis qu'elle est plus autonome avec sa canne, elle sort souvent faire un tour dehors, marche dans l'entrée et sur le terrain. Elle a fait aussi plusieurs marches en forêt avec Gilbert ou Renaud, et elle se débrouille pas mal bien sur différents terrains. D'après son ergothérapeute, elle devrait pouvoir faire de la raquette cet hiver avec des bâtons de randonnée.
Élianne a beaucoup profité de nos vacances aux Îles pour prendre de l'assurance avec sa canne, elle se pratiquait pour son fameux marathon. Le 21 septembre, elle a marché 1 km en 18 min pour la Fondation du Bouclier. Elle était la seule vraie handicapée du groupe à marcher et ce fut toute une journée pour elle. Elle était bien fière et nous aussi. On était une dizaine à l'accompagner et nous avons aussi fait notre « marathon ». Quand on sait d'où elle part, on réalise à quel point c'était tout un exploit. Elle a pris beaucoup de force et d'endurance, au retour des Îles, on a remisé la marchette, elle, elle dit qu'elle l'a mise au recyclage!!! En passant, les vacances aux Îles c'était super, quand on aime la mer on est vraiment choyés là-bas.
Au marathon pour la Fondation du Bouclier : 1 km en 18 minutes
Élianne poursuit sa réadaptation au Bouclier de Saint-Jérôme, elle a maintenant un rythme de thérapies assez soutenu (c'est toute la gang de filles que vous voyez sur la photo). En août, lors du premier plan d'intervention, on a fixé les objectifs pour les trois prochains mois, et tout est en bonne voie de réalisation. Juste vous dire que l’objectif « autonomie avec la canne pour tous ses déplacements intérieurs » a été non seulement atteint en trois semaines, au lieu de trois mois, mais en plus, cela a été amplement dépassé puisqu'elle est généralement aussi autonome pour se déplacer à l'extérieur. Elle a besoin d'aide s'il y a un obstacle (genre chaîne de trottoir), mais même dans ce cas-là elle a commencé à apprendre comment faire. Quand elle est fatiguée, elle est moins sûre d'elle et demande une présence à ses côtés pour marcher, mais c'est rare ou juste par petites périodes. On a même fait une randonnée de près de 2 km l'autre jour dans des sentiers près de Sherbrooke, elle a bien suivi et avait juste un peu mal aux pieds après.
Avec ses thérapeutes du Bouclier, elle travaille beaucoup en physiothérapie pour l'équilibre, elle en a regagné quand même pas mal, c'est à poursuivre. Elle apprend à se faire un déjeuner toute seule, de façon efficace (genre 15 min), elle travaille beaucoup son bras gauche et il y a toujours un peu d'amélioration de ce côté. Elle travaille vraiment fort à identifier différentes choses, à les décrire, les nommer (ustensiles de cuisine, animaux, etc.), ce qui reste tout un défi pendant pour elle. Elle va au Bouclier trois à quatre fois par semaine pour quelques heures, et son éducatrice et son ergothérapeute viennent aussi à la maison. Avec tout cela, plus ses multiples autres rendez-vous (ostéopathe, massage, acupuncteur, entraînement de vélo, Padovan, ergothérapie en privé avec Laurence), elle a un horaire de ministre!!! Elle dort 10 à 12 heures par nuit pour récupérer et retrouver de l'énergie pour le lendemain!!!
Tranquillement, tout s'améliore. Elle reconnaît plus facilement les gens, du moins ceux qu'elle voit régulièrement. Elle apprend à s'orienter un peu plus, donc à observer, car l'orientation spatiale demeure un gros problème pour elle. Elle apprend à compenser sa mémoire défaillante (très défaillante, malgré l’amélioration) en notant tout, en se servant de son agenda. Elle travaille très fort pour maintenir les contacts avec ses amis, ce qui n'est pas évident. Nous sommes allés à Sherbrooke en octobre et y retournons en novembre, c'est vraiment important pour elle et nous nous arrangeons aussi à l'occasion pour qu'elle puisse passer une soirée à Montréal où sont tous ses amis.
(suite au prochain numéro)